L'œuvre de Laurence Le Constant trace les contours d'un monde envoûtant, peuplé de figures hybrides singulières. Les fantasmes de l'enfance sont ravivés, bercés par des légendes et des contes cosmiques auxquels elle emprunte de nombreuses références. À la fois figuratives et oniriques les scènes sont présentées de manière multiforme. Situé dans cet espace vaporeux entre l'imaginaire et le réel, les pièces créées ouvrent sur des questions métaphysiques et identitaires essentielles.
L'utilisation de matériaux nobles, de bois précieux, de cristaux, de plumes, de corail et de dents d'animaux fossilisés, maintient le pouvoir symbolique intact.
Si l'attrait visuel opère immédiatement, les œuvres ne révèlent leur secret ambivalent que dans une seconde phase, lorsque le plaisir visuel est passé.
L'artiste puise dans le riche héritage de sa formation d'ébéniste, de tapissier, de brodeuse et de plumassière pour offrir son introspective sinueuse et ses souvenirs envoûtants aux contours délicats et poétiques.
La dissociation du corps et de l'esprit est le sujet central d'étude de Laurence Le Constant; elle explore cette constante dualité à travers les différentes étapes de la vie: la difficulté de devenir femme, le déclin du vieillissement et la transition de la vie à la mort.
Dans la série My Lovely Bones, l'artiste devient archéologue de la mémoire. Premièrement nommées Dove, Tina et Maria, ses vanités sont portraits de femmes éminentes de près ou de loin, faisant écho à sa généalogie personnelle. Chaque pièce est unique et nécessite des centaines de heures de travail. Les plumes soigneusement sélectionnées, sont collées une à une sur une base en résine.
A mi-chemin entre l'art funéraire et la haute couture, l'artiste sculpte la plume comme on tisserait un cocon. Gestes incantatoires, technique hypnotique, derrière les symboles chargés d'angoisse, elle tente de conjurer l'oubli. Ce thème, offrant une gamme de reliques précieuses, oscille entre les plus délicates et l'émergence des plus archaïques et s'inspire de La Loba,un conte mexicain où la femme-loup ramasse des os appartenant à des animaux dans le désert, afin qu'ils ne soient pas perdus pour le monde. Le but est de préserver ce qui reste de ceux qui nous façonnent et d'éviter ainsi leur disparition effective. Ce sont des figures de proue qui rythment son histoire personnelle. Le prénom étant finalement le dernier souvenir cérémoniel.
Depuis l'exposition Her Garden, Laurence Le Constant reconstitue un jardin d'Eden perdu, conçu comme un rite dans différents microcosmes nostalgiques, rassemblant les morceaux épars de sa psyché. (..)
Texte Anne Claire Plantey, Artefacts